logo les belles affiches

Les belles affiches > l'humeur de "JLH" > Tropa de Elite I & II

Tropa de Elite I & II

par Jean-Luc Herbulot pour les belles affiches (relire l'interview)


Réalisation : José Padilha, 2007/2010

Tropa de Elite © Universal Picture
La critique

Séance de re-giflage annuelle avec Tropa de Elite 2. Chaque année c'est devenu un rituel, je me retape Troupe d'élite 1 et 2 à raison de trois, quatre fois, histoire de me remettre les synapses et les camouilles en place. On est loin du cliché qu'est malheureusement devenu La cité de Dieu et sa représentation des favelas avec tout ce que le film a engendré d'ersatz de copies et d'hommages plus ou moins débiles les uns que les autres. "Troupe d'élite" est beaucoup moins connu que son grand frère. La faute à un titre de série B et des affiches/pochettes dignes des plus grands bacs à chewing-gum. Une fois acheté le DVD dans un rayon similaire à Los Angeles en 2011, j'ai laissé dormir le bébé près d'un an avant de me décider de le dévorer suite à ma découverte du clip Rap Das Armas de Cidinho & Doca (l'hymne du 1er Tropa, que vous avez forcément entendu). La gifle... Mais revenons à l'origine du projet, Jose Padilha scénariste de La cité de Dieu, réa' du pas si mauvais reboot de Robocop et du récemment encensé Narcos, avait décidé de s'éloigner de sa cité de Dieu et de proposer quelque chose de plus politique, réaliste et brutal sur la vie des favelas de Rio. Il pond en 2007 et 2010 ce qui pour moi constitue la parfaite mayo entre brûlot social, film d'action, tragédie et film politique : Troupe d'élite 1 et 2. Là où le premier opus est plus orienté action brutale et tarte dans la tête, le deuxième est un film politique déguisé en thriller. Le scénario est un mécanisme d'horloge suisse qui démonte un à un les rouages d'une société corrompue, sans jamais se laisser avaler par un trop plein d'intellectualisme merdeux comme on le maîtrise si bien en France. C'est une leçon de géopolitique brésilienne pour tous à laquelle on assiste ici, une sorte de The Wire en 2h à Rio de Janeiro, loin des bimbos et des beaux gosses bouclés. Pour ceux qui connaissent bien le 1er opus, Padilha convoque tous les personnages, y compris ceux de second et troisième plan et leur donne à tous une raison de rire (cf Rocha - définitivement mon perso préféré). La forme ressemble à un thriller urbain cam' épaule nerveux sans fioritures, la musique lourde et lancinante, les gifles, les sacs sur la tête, les exécutions sommaires, la cruauté, le fric, les flingues, la corruption, l'amour, la trahison, tout ce que les brésiliens ont appris à maitriser pendant des décennies dans leurs soaps douteux mais mondialement efficaces, se retrouvent ici dans un film qui a le mérite de ne pas se regarder le cul dans le miroir. Efficace, sans concession, Tropa de Elite 2 est un film qui dit ce qu'il a à dire : Rio et son système est une lente gangrène alimentée par tous, pour tous, contre tous, l'abnégation et la passion de certains (Nascimento, Fraga, Matthias) font tenir le monstre en équilibre, mais jusqu'à quand ? Ce qu'il y a de plus malin et de rarement vu, est que Troupe d'Elite 1 est l'exacte antithèse de sa suite et inversement. En gros la suite de troupe d'élite tire sur son premier opus sans se renier elle-même. Un peu à la manière de Carlito's Way versus Scarface qui constituait une thèse et antithèse du même auteur. Et rien que pour ça le jeu vaut le détour. Je suggère fortement à ceux qui ne connaissent pas ces deux films de se les procurer au plus vite afin de découvrir Wagner Moura dans ce qu'il a fait de mieux et qui en fait un des meilleurs acteurs latinos. Idem pour Padilha qui a de ce fait rejoint la B LIST des réalisateurs Hollywoodiens. La VF est très bien, allez-y sans honte, le sujet toujours d'actualité, la puissance sauvage et dramatique voire drôlatique des deux films ne vieillit pas. Je pense d'ailleurs que certaines oeuvres récentes comme la série Gomorra doivent beaucoup au film de Padilha, qui est l'un des seuls à marier aussi bien le social, le politique et le dramatique avec autant de tension et de fun. Si on devait confier l'adaptation de Metal Gear à quelqu'un, c'est à ce type qu'il faudrait la donner. A vos télécommandes !


L'affiche

C'est tellement pourri que le graphiste devrait se retrouver devant la Cour Pénale Internationale pour crime contre le graphisme. On prie pour un Tropa de Elite 3 avec Julien Lemoine au design.