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Un ciel bleu presque parfait

Le pitch

Simon et Estelle. Un frère et une soeur. Une scène d'accident domestique digne d'un clip anti-NRA. Un film qui bascule : Simon se met à tracer des "crop circle" dans le champ du voisin, offre des poulpes morts à Estelle et écoute des extraterrestres à la radio. C'est important de souligner que Simon est incarné par Jean-Luc Couchard. Pourquoi ? Parce qu'avec sa moustache prolétaire et sa mèche grasse, Couchard est d'allure bonhomme, sympathique, banal presque, donc parfait pour incarner la démence quotidienne. Ouvrier inoffensif le jour, il se transforme en paysan reclus et parano le reste du temps. Important de souligner aussi qu'Estelle est incarnée par Mélanie Gaydos la célèbre "freak-model" à rendre jalouse toute la scène underground de Berlin et New York réunies. Trip rural à la Calvaire, exploration de la médiocrité humaine façon Strip Tease, couleurs proches d'un Gaspard Noé avec une pincée du M. Night Shyamalan de Signes. Le film vous colle à la peau et on ne l'oublie pas de sitôt.

Le réalisateur et son maquilleur Sfx

"Quarxx". Derrière ce surnom de logiciel PAO se cache le réalisateur d'Un ciel bleu presque parfait, LA surprise des courts-métrages 2016. Face à l'ampleur du phénomène nous nous sentons obligés d'en demander plus au monsieur. Les festivals du monde s'arrachent les copies et les critiques positives s'accumulent malgré la noirceur du projet, il faut bien le dire. "Un ciel" fait partie de ces films qui ne cherchent pas à séduire ou à se rendre sympathique, dans le style d'un Vénus noire ou d'un Million Dollar Baby. Il met mal à l'aise pour mieux bousculer son public en véhiculant des thèmes difficiles comme le handicap ou l'isolement rural. Au-delà d'un titre ironique il s'agit surtout un chef d'oeuvre au sens classique du terme : on y rentre dès la première seconde ou au contraire on reste sur le seuil, perplexe, dégoûté. Nous à la rédac' on y est entrés la tête la première pour en sortir les pieds devant. Alors pour exorciser nos démons en forme de poulpes morts, le mieux était de prendre rendez-vous avec "Quarxx" le psychiatre mais aussi son maquilleur David Scherer.


Quarxx (réalisateur)

Quarxx Arter

Salut Quarxx. Comment t'es venu l'idée de ce film et pourquoi ? En fait je procède par écriture automatique donc je sais comment je commence mais j'ignore où ça va me mener ! Je n'ai pas eu de déclic particulier en fin de compte, simplement l'envie de faire le meilleur film de genre français mais avec une note d'auteur, une sorte de genre croisé mais marquant. Mon film précédent, Nuit Noire, était aussi très sombre puisqu'il parlait des prostituées dans les rues de banlieue. Je viens de la comédie à la base, j'ai réalisé une série totalement burlesque qui s'appelle Rasta Kamikaze Bang-Bang, Marginal Tango et Zeropolis mais comme j'avais le sentiment d'en avoir fait le tour j'ai commencé à écrire des films noirs. Décris ton film en trois mots. Surréaliste, sombre, atypique. Qu'est-ce que tu dirais à quelqu'un qui déteste ton film ? Eh bien il en faut pour tous les goûts. J'adore être aduler ou détester je n'aime pas trop le tiède !(rires) Et je ne cherche pas à plaire non plus. C'est vrai que le film prête à la polémique, il n'est pas forcément destiné à un grand public et ne recherche pas l'adhésion générale. Tu sais le clivage est salutaire dans l'art ! J'ai simplement fait le film que je voulais faire, sans contrainte puisqu'on avait des financements indépendants. On pense à beaucoup de choses après avoir vu ton film : Calvaire de Fabrice du Welz, Strip Tease, Signes de Shyamalan, Gaspard Noé ou encore Zulawski... Mais avec un côté très personnel. Quelle est ta référence principale ? Je me sens proche de tous les gens que tu cites, il y a aussi un côté « Grolandais » ! Avant je faisais des films très référentiels, avec des clins d'oeil de cinéphiles... Et puis j'ai voulu y couper court et être influencé au minimum. Mais forcément, inconsciemment, ton film est toujours marqué par ta culture, ton vécu, alors il faut essayer de rester le plus personnel possible. La scène du revolver est particulièrement choquante. Comment as-tu expliqué cette scène aux enfants et à leurs parents ? Cela a été un véritable calvaire de trouver des enfants mais le scénario n'a pas aidé faut dire !(rires) C'est très dur de trouver des enfants qui savent jouer surtout lorsqu'il y a des problématiques corsées. Pas mal de parents ont été enthousiastes au début et beaucoup moins après la lecture ! Finalement un ami me présente cette petite fille qui avait l'avantage d'avoir quelques traits de ressemblances avec l'actrice Mélanie Gaydos. La fillette n'avait jamais joué avant alors au début elle était impressionnée par ce monde d'adultes avec 70 personnes sur le plateau ! Finalement elle s'est beaucoup amusée et comme tout a été géré en post-prod elle ne s'est rendue compte de rien sur place. Mais je te rassure elle va très bien ! D'où vient l'idée du poulpe ? Encore une fois ce surréalisme empreint de réalisme. C'est un moyen d'illustrer la fuite en avant du personnage, sa folie. Et puis l'acteur Jean-Luc Couchard est une star en Belgique et le surréalisme belge est très important, son énergie aussi. Parlons de Mélanie Gaydos, aperçue également dans le clip de Rammstein "Mein Herz Brennt". Dans quelles conditions l'as-tu castée ? J'ai galéré six mois avant de la trouver ! Je cherchais une comédienne tout sauf classique, qui puisse incarner le personnage sans être grimée ou avec des prothèses mais avec une vraie déformation physique, mais je ne trouvais pas. Et puis par un heureux hasard je tombe sur un magasine en anglais où elle donnait une interview sur son parcours. Même si mes chances étaient minces d'avoir son contact j'ai quand même essayé. Je suis parvenu à lui envoyer un mail et elle a accepté de lire le scénario. Elle a finalement adoré et m'a donné son accord. C'est une fille très à l'aise, décontractée et super sympa. Alors les fameux crop circle ! Tu es du genre à croire au signal extraterrestre ou plutôt une manipulation humaine ? Bon, je ne dénonce rien. Le film n'est pas une enquête sur les crop circle. Disons que c'est juste un moyen de mettre en avant l'obsession du personnage, de poser l'intrigue pour ne découvrir qu'à la fin ce qu'il a fait. C'est bien Simon qui réalise ses cercles pour contacter des extraterrestres qui n'existent que dans sa tête. C'est aussi une manière pour lui de se dédouaner de l'accident et de fuir ce qu'il a fait avec sa sœur. Le film tourne en festival actuellement. Quelles sont les premières réactions ? Hyper positives ! On tourne sur une vingtaine de festivals actuellement en France et aux Etats-Unis. On a fait Gerardmer, le Bloody week-end, Miami, New York, Toronto... On a aussi des retours presses dans Mad Movies et Court Central nous a même consacré une émission. On a également 70 festivals en attente y compris Moscou ! Malgré la durée du film de 40mn et ses thèmes difficiles nous n'avons eu que deux ou trois refus. Parlons un peu des affiches. Quelques mots sur tes posters préférés. J'adore les années 70 à 80. Il y avait une créativité folle et de grands illustrateurs de cinéma. Particulièrement le cinéma d'épouvante et d'horreur avec ses affiches incroyables qui ont tapissées ma chambre d'adolescent. Aujourd'hui tout est plus codifié avec une couleur pour la comédie, une pour le drame etc. L'affiche de film que tu peux contempler pendant des heures ? C'est difficile là ! Je dirais le premier Vampire, vous avez dit vampire ? (Fright Night, Tom Holland, 1985) et puis quand même celle d'Anthropophagous (Joe D'Amato, 1980) avec ce type qui mange ses intestins ! Des projets en perspective ? Je travaille avec ma directrice de production sur la version long-métrage du film. On était à Cannes et c'était fructueux. On s'oriente vers une co-production franco-belge alors on multiplie les rendez-vous avec les distributeurs français. Quoiqu'il arrive le tournage débutera vers mai-juin 2017. Quarxx, merci beaucoup et bonne route. Je t'en prie, merci à toi.


David Scherer (maquilleur Sfx)

David Scherer

Bonjour David. Brièvement raconte-nous ton parcours. C'est assez particulier. Je dirais que c'est assez simple mais pas très classique ! (rires) En fait je suis fan de fantastique depuis le lycée. J'allais au vidéo club tous les week-end et c'est là que j'ai découvert mes premiers Argento et puis des films comme Razorback, Massacre à la tronçonneuse... Je suis tombé amoureux du genre et du coup j'ai toujours voulu travailler dedans. Pas forcément dans les effets spéciaux au départ mais au moins côtoyer l'univers du fantastique. Ensuite c'est avec un numéro de Fangoria que je me suis exercé. Je me suis installé dans le garage de mes parents et j'ai commencé à essayer ce qui marchait et ce qui ne marchait pas. Après bien sûr j'ai fait quelques courts-métrages mais le plus présentable d'entre eux c'était en 2004 Le bon, la brute et les zombies d'Abel Ferry. J'ai pu peaufiner mes techniques. Ensuite il y a des rencontres, des séries télé et puis le long-métrage d'Hélène Cattet et Bruno Forzani : L'étrange couleur des larmes de ton corps en 2013. En France, y a-t-il une école ou une formation particulière pour devenir maquilleur de cinéma ? A la base j'ai une formation de sociologie ce qui n'a rien à voir (rires) ! Je n'ai pas fait d'école même si c'est confortable d'y étudier. Dans le fantastique je trouve que ce n'est pas intéressant d'assister à des démos de plusieurs heures. J'apprécie le côté âpre du tournage, l'action directe, cet aspect « live ». Venons-en au film. Raconte-nous ta première réaction à la lecture du scénario d'Un ciel bleu presque parfait ? J'ai adoré l'histoire, elle m'a inspiré des images précises c'était génial ! Mais d'un autre côté je me suis dit que cela allait être compliqué. Je parlais avec Quarxx de la scène du revolver. Comment l'as-tu abordée ? Je vais te décevoir, c'est Camille Vinet le superviseur post-prod qui a réalisé l'effet. Il est d'ailleurs parvenu à rattraper certaines choses comme le rajout de palpitations, le clignement d'oeil des aliens... Dans le film, l'effet spécial est très visible un peu à la manière des films "gore", sauf que le sujet est dramatique. Travailler sur une comédie ou un drame ça fait une différence ou pas ? Je dirais que ça dépend. Je m'adapte au réalisateur. Quarxx en l'occurence avait des idées précises sur l'ambiance, l'impact, il cherchait des images chocs pour amplifier son propos. Décris-nous tes méthodes de travail. Alors c'est incroyablement varié ! Prenons un exemple concret, celui du monstre face au miroir. Alex (Quarxx, NDLR), avait déjà un design hyper précis. J'ai réalisé une sculpture et lui ai envoyé des photos. Après validation j'ai effectué un moulage puis un masque en silicone que j'ai ajusté sur le comédien. Les maquilleurs sont souvent des stars « cachés », des travailleurs de l'ombre, on pense à Rob Bottin ou Stan Winston... Lesquels ont ta préférence et pourquoi ? Pour en citer un en particulier ce serait Giannetto De Rossi. C'était le maquilleur de Lucio Fulci mais il travaillait aussi pour Sergio Leone ! En France il a travaillé avec Alexandre Aja sur Haute Tension. Bien sûr Stan Winston c'est monstrueux ce qu'il fait mais De Rossi se débrouille avec trois fois rien, souvent tout seul. Il optimise au maximum son travail il est vraiment passionnant. En France y a-t-il un ou une maquilleuse que tu admires particulièrement ? Benoît Lestang qui malheureusement nous a quitté trop tôt. Quelqu'un de profondément sensible et humain. Après je ne les rencontre pas tous, j'aime bien rester dans mon coin et garder mon côté enfant ! Le site est consacré aux affiches de films. Tu y fais attention ou tu es plutôt du genre à passer devant sans trop t'attarder ? Ah très attention ! J'aime beaucoup les affiches de Lucio Fulci et de manière plus générale les films italiens de cette période. L'affiche de "L'au-delà" particulièrement avec le cadavre crucifié en putréfaction. Je tient d'ailleurs à saluer le travail de The Ectasy of Films qui rééditent ce genre de films en DVD. Le site est consacré aux affiches de films. Tu y fais attention ou tu es plutôt du genre à passer devant sans trop t'attarder ? Ah très attention ! J'aime beaucoup les affiches de Lucio Fulci et de manière plus générale les films italiens de cette période. L'affiche de "L'au-delà" particulièrement avec le cadavre crucifié en putréfaction. Je tient d'ailleurs à saluer le travail de The Ectasy of Films qui rééditent ce genre de films en DVD. Y-a-t'il une affiche de film qui t'as marquée et que tu n'oublieras jamais ? Alors pour l'adolescence je dirais "Massacre à la tronçonneuse", "Razorback" et "Poltergeist". Et puis récemment "L'étrange couleur des larmes de ton corps" conçue par Gilles Vranckx, le film de Cattet et Forzani. Le film que tu amènes sur une île déserte ? Sans hésitation Profondo Rosso de Dario Argento. Ce film est une interrogation sur le regard totalement sublime. Déjà vu un film grâce à l'affiche ? Alors rien que pour l'affiche je dirais "Killer Clowns From Outter Space", des frères Chiodo. Tes projets ? Je suis en tournage depuis fin mai pour l'adaptation de "Laissez bronzer les cadavres", le roman de Bastid et Manchette réalisé par Hélène Cattet et Bruno Forzani. David, merci beaucoup. Je t'en prie, à bientôt.