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Le masque du dictateur

Immortan Joe le dictateur

Immortan Joe est un dictateur, un vrai, celui du désert. Dans Mad Max Fury Road l'acteur Hugh Keays-Byrne incarne le chef charismatique et totalitaire qui, dans un monde aride est le seul à bénéficier de l'eau courante, d'un potager privé, de lait frais et même... d'une banque de sang. Comble du luxe ; il se réserve les plus belles femmes (vierges évidemment) pour assurer sa descendance. Quant au peuple eh bien il survit à genoux tout en bas de la pyramide. Leur « président » s'impose par la force et fait régner l'ordre grâce à son armée de fanatiques : les War Boys qui s'imaginent déjà marcher au Paradis aux côtés de leur chef. Oui le dictateur est définitivement impitoyable et s'impose par une apparence impeccable. C'est l'occasion pour les belles affiches d'étudier quelques acteurs qui ont eu le courage d'interpréter le «tyran» car c'est tout le paradoxe du personnage : diable personnifié ou simple mortel dépassé par la situation ? Derrière les masques en forme de mâchoire ou l'uniforme de l'armée se cachent souvent des troubles effrayants. Eh bien grâce à dix films incontournables vous en saurez un peu plus sur ces présidents à vie... ou rien.


The Great Dictator (Charles Chaplin - 1940)

Charlie Chaplin est Adolf Hitler

On ouvre le placard à DVD avec le classique des classiques. Le cantique des cantiques. Le génie immortel Charlie Chaplin incarne Adenoid Hynkel qui rêve de conquérir le monde avec son logo rouge et noir tandis qu'un pauvre barbier s'échine à fuir les persécutions de son régime. Le grand Charles réalise son chef d'oeuvre en pleine ascension du IIIème Reich et accuse même Hitler d'avoir piquer sa moustache ! Mégalomane, maniaque et exubérant en public, Hynkel devient ridiculement puéril en privé. Chaplin capte parfaitement l'ambivalence du personnage tour à tour pathétique et dangereux. Longévité : Chez Hitler on ne bat pas des records de longévité au pouvoir : dix ans (de trop?) tout de même. Merci les alliés. Style : Livres brûlés, défilés à la symétrie mathématique, industrie de guerre et artillerie lourde mais dans le genre tortures, expériences scientifiques douteuses et persécutions diverses Hitler écrase la concurrence. Difficile de trouver pire mais qui sait, en cherchant bien... Look : C'est du lourd. Casquette militaire vissée jusqu'aux yeux, pardessus cintré noir, médaille, raie plaquée sur le côté et rasé derrière... sans oublier les généraux SS et leurs casquettes surmontées de tête de mort. Les opposants en frissonnent encore dans leur tombe. Fin tragique : Comme la plupart de ses copains, Adolf finit à poil. Un suicide au cyanure avec sa femme plus précisément. Pas terrible.

Salvador (Oliver Stone – 1986)

Juan Fernández cumule Alfredo Cristiani, Jorge Videla, Rios Montt et Augusto Pinochet

A l'époque c'est l'Arena qui règne sur le Salvador avec sa croix néo-germanique sur fond bleu blanc rouge et son businessman véreux Alfredo Cristiani aux commandes. Dans le film, l'inquiétant et génial Juan Fernández synthétise à lui seul la junte militaire. C'est d'autant plus fort qu'il s'agit d'un second rôle sans beaucoup de répliques, tout passe par la gestuelle : sourire en coin, regard hautain, sentiment de toute-puissance et troubles psychotiques dans le chargeur. Le dictateur latino est avant tout un militaire rigide, froid, névrosé, sec, parano et sans pitié. Le film aurait très bien pu se dérouler au Guatemala, en Argentine, au Paraguay ou au Chili on aurait le même résultat puisque c'est la guerre froide et les Etats-Unis sont prêts à tout pour lutter contre le communisme du sud continent. Prétexte bien utile pour plomber l'économie locale et soutenir les pires salopards de la planète. Au passage James Woods décroche une nomination aux Oscars, Jim Belushi son meilleur rôle et le monde découvre Oliver Stone. Enchanté monsieur. Longévité : Cristiani, Pinochet, Montt et Videla cumulent vingt-sept ans de pouvoir à eux quatre. Pas énorme mais si on en juge aux nombres de victimes valait mieux s'arrêter avant. Prix spécial du jury à Rios Montt, le "vampire du Guatemala", qui en seulement une année de "pouvoir" expédiera 200 000 personnes à la morgue. Record à battre. Style : On applique les mesures de l'oncle Sam sans broncher, on remplit son livret A en Suisse pour la retraite, on égorge les opposants, on viole leur femme, on vole leur bébé, on empile leur cadavre sur la place publique, on flingue les pasteurs et on balance les étudiants gauchistes depuis l'hélico en pleine mer. Stylé. Look : Uniforme strict de l'armée qui resserre la silhouette, sourire de requin, regard de glace, mâchoires crispées, moustache virile, fusil mitrailleur chargé à bloc et poigne de fer dans des gants de cuir. Valait mieux voter pour eux en 80. Fin tragique : Les généraux ont une préférence pour l'exil doré au frais des Etats-Unis ou de la couronne britannique. Mais les amis d'hier deviennent les ennemis d'aujourd'hui quand vous n'avez plus rien à vendre. Passé la barre des quatre-vingt ans, le tribunal les convoque pour mourir d'une crise cardiaque dans leur cellule. L'avocat peut respirer.

El Zaim (« Le leader » Adel Imam - 1993)

Adel Imam est Hosni Moubarak

Bien avant Sacha Baron Cohen, Adel Imam incarnait le leader arabe dans toute sa splendeur. Preuve que même sous des régimes totalitaires la liberté de parole a sa place. Adel commence sa carrière dans les années 70 comme simple comédien au Caire. Au fil du temps il devient plus critique et dénonce la corruption endémique de la classe dirigeante égyptienne et l'obscurantisme religieux. Son arme ? L'ironie acide et le comique-troupier. Considéré par beaucoup comme le Coluche arabe, son film Le terroriste (1994) lui vaut une condamnation à mort des Frères Musulmans et le président Moubarak en personne le place sous protection policière. Pas rancunier l'ami Hosni car un an auparavant Adel réalisait LA pièce de théâtre « Le leader » (Al Zaim en arabe) dans laquelle il dénonçait l'autocratie archaïque de la famille régnante et les frustrations mégalomanes des dirigeants arabes. Contrairement à notre regretté Coluche, Adel est toujours en activité à l'heure actuelle. Ouf. Longévité : vingt-neuf ans pour Hosni le honni, pas mal. Style : Comme tout bon militaire sa patience a des limites, contrairement à son compte en banque. Au Caire on croise indifféremment des manges-poubelles et des milliardaires en Rolex. Hosni encaisse les dividendes américaines qu'il re-dépense n'importe comment : corruption, détournement, comptes offshore, marchés publics bidons... Dommage car la carrière était bien partie avec un diplôme en sciences militaires et aviation. La faute au pouvoir ? Look : Derrière l'uniforme rigide col Mao du commandant de l'armée de l'air se cache un costume rayé sombre, une chemise blanche impeccable et un profil de parrain sicilien. Respect oui mais surtout distance... d'avec le peuple. Fin tragique : Pris dans les foudres d'une révolution 2.0, trop vieux et mal en point, même la police du régime ne cogne pas assez fort sur la foule. Pour l'instant Hosni a toujours la tête sur les épaules mais passe son temps sur une civière entre la prison VIP du Caire et le tribunal qui collectionne les chefs d'accusations.

Lord of War (Andrew Niccol – 2005)

Eamonn Walker est Charles Taylor

On atterrit en Afrique noire, terre fertile pour les grands démocrates. L'excellent Eamonn Walker de Oz (voir dossier) interprète avec sourire sadique et regard haineux Charles Taylor ("André Baptiste" dans le film) l'ex-président du Liberia. Moins bon en foot que George Weah mais plus doué au tir d'AK-47 c'est surtout un gros client des marchands d'armes et immense névrosé obsédé par ses opposants politiques, ses trafics, ses comptes offshore, ses diamants et ses innombrables guerres civiles. 400 000 morts au bas mot. Sinon le film est super. Pour le gros Charles et sa bonne bouille (presque) inoffensive, le masque du dictateur ressemble à quoi ? Longévité : « seulement » six ans à la présidence et vu les dégâts c'est déjà beaucoup. Style : Pas vraiment de ligne politique claire, à part déclarer la guerre aux voisins et flinguer le peuple. Il obtient quand même un diplôme en économie aux Etats-Unis qu'il met à profit pour détourner 900 000$ en trois ans au Liberia. S'en suivent tout un lot de crimes de guerre, crimes contre l'humanité, assassinats, viols, enrôlement d'enfants soldats, extermination de masse, terrains minés, amputations, bref les chefs d'inculpations ne manquent pas et il les collectionnera jusqu'à sa mort. Look : Tenue paramilitaire très pratique en brousse et puis fonction officielle oblige il passe au large col ouvert, bagues en or, gourmettes en or, pin's en or, bouton de manchettes en or, lunettes noires dorées et cravates en soie. Du caviar. Fin tragique : Cas unique. Après une démission et un exil au Nigeria ses alliés le lâchent et il se retrouve à La Haye sur le banc des accusés. Sentence ? Cinquante piges ferme confirmée en appel pour crimes de guerre. Sa peine Charles la passe actuellement en Angleterre, double peine donc.

Le dernier roi d'Ecosse (Kevin McDonald – 2006)

Forest Whitaker est Idi Amin Dada

Il faut toujours voir un film jusqu'au bout car même s'il peut mal démarrer on peut être totalement retourné à la fin. Le dernier roi d'Ecosse fait parti de ces films imprévisibles et d'apparence anodine. Au final peut-être un des meilleurs films sur les dictatures africaines tellement délicates à mettre en scène. On pourrait aussi citer l'excellent Katanga Business ou l'effrayant Cauchemar de Darwin. Alors le jeune toubib écossais débarque en Ouganda post-indépendance des années 70. Tous les espoirs sont permis pour ce petit pays d'Afrique de l'Est. Oui mais bon, le général Dada va glisser peu à peu dans la parano et la démence sanguinaire, sans compter les décisions politiques désastreuses. Forest Whitaker et son Oscar jouent sur la ligne rouge attraction/répulsion/déconneur/tyran névrosé. C'est sublime pour un film mais terrible pour les espoirs (déchus) de tout un pays. Longévité : Petit joueur, huit ans seulement, mais il se rattrape avec le style... Style : « Général-Président à vie » donc peut enclin au pluralisme politique. Le nombre de victimes est impressionnant si on s'en tient à la taille du pays : entre 100 000 et 500 000. Ses vices préférés : décapitations, tortures variées, assassinats, amputations, jet de dynamite en pleine cellule, expulsions massives d'étrangers (indo-pakistanais principalement), on lui prête même des tendances cannibales et des pathologies syphilitiques. Après son règne, l'Ouganda ressemblera aux côtes américaines après le passage de Cynthia et Katrina. Look : Carrure de rugbyman débonnaire, sourire innocent et dégaine à la cool très 70's finalement. Mais l'uniforme du général bardé de décorations rappelle qu'il ne faut pas chatouiller là où ça fait mal. Fin tragique : Exil forcé après une guerre perdue face à la Tanzanie qui envahit la capitale. L'Arabie Saoudite accueille notre général par la petite porte mais lui offre tout de même une retraite confortable avec chauffeur et pension mensuelle. Il meurt à l'hôpital en 2003. Peut mieux faire.

The Dictator (Larry Charles - 2012)

Sacha Baron Cohen cumule Mouammar Khadafi & Saddam Hussein

Sacha dans son rôle préféré : le postiche lourdingue. A mi-chemin entre le radical religieux bling-bling et le Général-Président du désert, il capte plutôt bien l'apparence de ces dictateurs-bac-à-sable riches à milliards mais au futur incertain. La preuve ; il se retrouve à servir de la junkfood derrière un comptoir. Après Borat et Ali G, il enfile les épaulettes d'Aladeen Efawadh, ersatz de l'ex-leader lybien Mouammar Khadafi et feu l'irakien Saddam Hussein. Comme ses deux défunts modèles il en fait des tonnes avec son défilé de chameaux, son yacht à partouze, ses lunettes Miami Vice, son culte outrancier de la personnalité et sa passion pour le totalitarisme psychotique. Longévité : Vingt-trois ans pour Saddam, quarante et un pour Mouammar. Un record est établi. Style : Portraits XXL présents jusque dans les chiottes des aéroports, répressions sévères, opposition interdites, ça file droit sous le soleil du désert. Mouammar affectionne particulièrement la pendaison et la mutilation des opposants qu'il retransmet volontiers à la télé au petit déjeuner. Saddam préfère les armes chimiques grâce auxquelles il asperge de temps en temps kurdes et chiites, sans parler de la censure omniprésente et autres exécutions sommaires dans l'arrière-cour des prisons. Look : Mouammar est un top model. Question fringue difficile de lui tenir tête. Gandoura en or, toque de velours, veste militaire blanche immaculée, lunettes fumées, badge africain de ¾ de diamètre et toujours quelques grammes de coke dans la narine. Un must indétronable. Saddam, lui, est plutôt du style débonnaire au costume trois pièces impeccable, cigare planquée sous une moustache virile, béret militaire et lunette de soleil pour tir en extérieur, de préférence entouré de caméras et d'une foule en délire. Fin tragique : Sergio Leone n'aurait pas fait mieux. Après plusieurs semaines de traque dans tout le pays, la foule extirpe Mouammar de son tunnel, le lynche et le flingue avant de le prendre en photos pour Facebook. Et Saddam ? Après un procès-parodie, il croupit en taule et finit pendu au petit matin, ce qui fera le bonheur de YouTube.

Dégage ! (Mohamed Zran – 2012)

Zine "el-Abidine" Ben Ali est Zine "el-Abidine" Ben Ali

La Tunisie est une terre de cinéma et elle l'était même sous les pressions du RCD. La preuve, à la prod. on retrouve Quinta Communications la boîte de Tarak Ben Ammar. En revanche le documentaire de Mohamed Zran n'aurait jamais existé sans la révolution de janvier. A bout de souffle, Zine El Abidine et sa bande de mafieux d'opérette n'anticipent pas la grogne populaire et le soutien tacite de la CIA pour un changement de régime. L'armée ne tire pas sur le peuple c'est la police qui s'en charge, mais pas assez fort visiblement puisque Ben Ali est obligé de fuir dans un avion Tunisair qui pour une fois arrive à l'heure. Le docu s'attache aux réactions des tunisiens de tous les jours, ceux qui souffrent comme n'importe quel peuple sous le joug d'une junte policière et son lot habituel de répression abusive, vol, corruption, censure et propagande. Il fait décidément très chaud sous le soleil africain. Longévité : Vingt-trois ans. Zine est beau joueur, normal puisqu'il s'appelle "Zine" ("beau" en arabe). Style : Régime policier parano et sclérosé. Economiquement Zine applique les mesures du FMI à la lettre et la classe dirigeante proche de la "famille" s'enrichit outrageusement. Les autres peuvent toujours s'immoler c'est pas ça qui les empêchera de dormir. Flicage de la populace, Internet sous contrôle, torture des opposants, pluralisme interdit, presse censurée, pensée unique, dénonciations, détournements de fonds, déclassements de terrains, projets immobiliers véreux, portraits géants du président jusque sur l'étale des bouchers, police partout en uniforme et en civil. Look : Silhouette trapue du chef de caserne qui t'en colle une au moindre faux pas, Zine a le regard noir, les sourcils noirs, les yeux noirs, les cheveux plaqués teints en noir, les chaussures vernies noires et le costume noir croisé trois pièces sur-mesure made in France. Une apparence qui impose le respect mais la plus grande méfiance aussi. Attention au flingue caché dans la doublure. Fin tragique : Après un quinquennat de vingt ans, Zine et sa femme fuient en avion et s'exilent là où on les accueillent... l'Arabie Saoudite, tiens, tiens... "Charité islamique" dixit le mémo officiel du roi. Les lingots au chaud et les comptes suisses bien remplis, Zine coule une retraite paisible et finira à l'hôpital du roi Fayçal. Comme le cousin Amin.

Le crocodile du Botswanga (Lionel Steketee - 2014)

Thomas NGijol cumule Jean-Bedel Bokassa & Mobutu Sese Seko

On reste en Afrique mais avec une touche de légèreté bienvenue. Le néo-camerounais du Jamel Comedy Club Thomas NGijol et son pote Fabrice Eboué s'attaquent aux coulisses du foot « Françafricain » en parodiant jusqu'au nom du pays : le bien nommé "Botswanga". C'est risqué parce que les coulisses du sport en France ça donne des « 3-0 » avec Samuel le Bihan. Heureusement Thomas et Fabrice ont un humour potache qui désamorce la situation. Le Capitaine-Démocrate "Bobo" est un hybride francophone du pitre britannique Baron Cohen. Hybride de qui ? Eh bien on reconnaît sous l'uniforme Mobutu Sese Seko du Zaïre et Jean-Bedel Bokassa, auto-proclamé Empereur Ier de Centre Afrique. Tous deux partagent la même mégalomanie maladive, le surculte de la personnalité, le string léopard, l'allergie perverse à l'opposant politique et la faculté à détruire l'économie nationale. L'armée a tous les droits et se livre aux pires exactions pendant que les kleptocrates du pouvoir détournent les fonds publics et s'adonnent à la corruption, ce qui permettra à beaucoup de banques étrangères de faire le plein de LDD. Longévité : Trente et un ans pour le maréchal Joseph-Désiré et dix-sept ans pour Jean-Bedel "le Soudard" dixit De Gaulle, un autre général. Style : Cumul des mandats militaro-politiques avec du Maréchal-Gouverneur- Président-Empereur à vie, fortune inestimable, violence du régime, enlèvement, assassinat, meurtre, détournement de fonds, propagande démesurée... on trouve même des accusations de cannibalisme et d'anthropophagie à l'encontre de Bokassa et sa couronne à cinq millions de dollars. Et la fosse aux crocodiles c'était pour de vrai ? Look : la grande classe. Toque léopard, lunettes noires angoissantes, tenue cintrée typique des 70's et col pelle à tarte multicolore fermé jusqu'aux yeux pour Mobutu. Strict mais original. Chic et choc. Costume du maréchal-bidasse, œil mi-clos et sourire en coin qui régale la foule pour Bokassa, préférant largement les capes impériales signées Pierre Cardin et les aigles royaux Olivier Brice. En plus il aime partager les diamants. Fin tragique : Joseph et sa toque en peau de léopard s'écroulent avec le mur de Berlin, la crise rwandaise et la guerre du Congo. Seul au monde, son cancer de la prostate l'oblige à fuir en Suisse puis en France pour finalement mourir à Rabat. Quant à Jean-Bedel, pendant qu'il vadrouille en Libye, les commandos français reprennent Bangui à son nez et à sa barbe ce qui l'oblige à fuir à Abidjan, puis en France (quoi ?) et ultime retour à Bangui pour un procès-fleuve, une peine de mort, prison à vie puis crise cardiaque.

The Interview (Evan Goldberg & Seth Rogen – 2014)

Randall Park est Kim Jong-Un

On quitte la chaleur étouffante des plateaux africains et on saute dans l'avion pour un loooong voyage en Corée du Nord avec ses montagnes brumeuses et ses immeubles symétriques. Si vous cherchez les boîtes à la mode et les restaus tendances passez votre chemin. Avec The Interview la bande à Goldberg débarque dans le bunker de la famille Jong-un pour buter le fiston. La faute à une coupe de cheveux inadmissible. C'est l'occasion de découvrir un super acteur : Randall Park. Malheureusement, à cause d'une histoire de films piratés de la maison Sony, l'interprétation de Randall passera presque inaperçue. Kim aurait-il le bras aussi long ? Longévité : Quatorze ans pour le papa, trois pour le fils mais tout porte à croire qu'il tiendra plus longtemps que son père, à moins que la CIA ne s'en mêle... Comme disait Félix Gray : « il faut laisser le temps au temps » Style : Qui dit régime communiste centralisé dit régime tout court pour la populace qui mange ce que le Parti lui jette. Famines et tortures de prisonniers politiques sont monnaies courantes chez le père. Le fils est plus lourdement porté sur le culte outrancier de la personnalité et aime martyriser les petits animaux en privée. Aucune opposition n'est tolérée, la presse est verrouillée, les libertés de cultes inexistantes et la plupart du budget part dans les poches des généraux ou celles du Parti Unique. Une pure merveille. Look : Tenue communiste typique du Livre Rouge. Rigide et sombre pour rappeler l'aspect ouvrier et affiner la silhouette, col Mao pour une (légère) touche de raffinement asiatique, pin's du Parti sur le cœur quand ce n'est pas le drapeau du pays. Avec Kim junior tout est dans le regard : sadique et enfantin. Fin tragique : Difficile pour la CIA de prendre d'assaut la Corée du Nord entourée d'eau, de montagnes, de chinois et de russes, donc pas de guerre civile ou d'exil à l'horizon. Et puis c'est pas les crevards du camp Yodok qui vont faire peur aux Kim. Dans la famille on meurt tranquille dans son lit d'une crise cardiaque. On verra si le fils est plus inspiré que le père. « Il faut laisser le temps au temps »...

Beasts of No Nation (Cary Joji Fukunaga – 2015)

Idriss Elba est le Charles Taylor de Netflix

Actu oblige, on retourne vite fait en Afrique pour un dernier tour de chauffe. Adapté du roman éponyme du nigérian Uzodinma Iweala paru en 2005, la chaîne Netflix pose près de six millions de dollars sur la table pour produire le bébé, preuve que les séries télé n'ont plus rien à envier aux studios Hollywoodiens. Il s'agit pourtant bien d'un film qui colle au plus près de la réalité car Idriss Elba, dix ans après Eamonn Walker, incarne à nouveau le délicieux Charles Taylor. Plus concentré sur l'aspect guérillero impitoyable, Idriss a bien cadré son personnage : lutter sans merci pour accéder au pouvoir et s'enrichir le plus vite possible en éradiquant toute forme d'opposition. Son arme fétiche : les enfants soldats et les champs de mine. Longévité : Netflix est là pour durer et produira de plus en plus de films. Style : Plus osé et moins frileux que les Majors et le CNC réunis. Look : un logo Netflix très campus américain à la sauce super héros. Fin tragique : Pour l'instant rien de semble arrêter la progression de Netflix et l'audace de ses réalisateurs, rendez-vous dans cinquante ans...