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Marc Duret : comédien


Marc Duret c'est 33 ans de carrière. Cinéma, télé, séries, courts-métrages, théâtre. C'est l'inspecteur Baumann dans le Dobermann de Jan Kounen, c'est le Roberto du Grand Bleu de Besson, le cardinal Briçonnet des Borgia de Tom Fontana sur Canal+ (voir dossier spécial), c'est un visage indispensable du cinéma français, familier mais inquiétant car le monsieur aime les rôles complexes. Il traverse les époques avec son charisme naturel qui lui permet de s'adapter à tous les univers possibles : action, drame, polar, comédie... Mais derrière le masque de Dracula se cache un acteur aimable qui, gentiment, accorde aux belles affiches un entretien piqué d'humour.


Le comédien français Marc Duret

Alors d'abord Marc merci pour cet entretien, parce que tu es en partie responsable de ma passion pour le cinéma. En 1994 j'avais 16 ans et j'ai eu deux révélations : le foot avec la coupe du monde aux Etats-Unis et le cinéma avec TF1 qui diffusait LA version longue du Grand Bleu. Alors s'il te plaît, toi qui jouait Roberto, raconte-nous ton histoire du film. Difficile de tout te raconter, mais ce que je peux te dire c’est que Jean(Reno, NDLR) et moi nous voyons toujours grâce au Grand Bleu et que c’est une amitié grande et bleue (rires) Avec une carrière débutée dans les années 80 et le recul actuel que tu possèdes, aurais-tu aimé faire un autre métier ? Non. Justement en tant qu'acteur est-ce que tu réfléchis à l'impact que ton travail peut avoir sur le public ? Surtout qu'on le verra plus tard, tu ne joues pas toujours des types sympas... Je joue ce que je peux... Quant aux types pas sympas, il faut pour bien les jouer les aimer d’abord. Tu as travaillé plusieurs fois pour Besson justement. Des projets ensemble dans l'avenir ? Ou tu as ta carrière et lui la sienne ? Pas de projets pour l'instant. Dans Nikita et Dobermann il y a le génial Tchéky Karyo avec toi au casting. Vous êtes amis proches ou c'est juste le hasard du boulot qui vous rassemble ? Nous sommes devenus amis. Alors Dobermann ! (adapté de l'oeuvre de Joël Houssin). Raconte brièvement : ta collaboration avec Kounen et Karyo en passant par le travail de ton personnage. Est-ce-que ça laisse des traces ? Le principe d’un bon film est qu’il laisse des traces surtout chez le public. Nous, acteurs, nous entrons et sortant d'une peau, enfin on essaye !(rires) D'ailleurs c'est dingue dans ce film on a plus peur des flics que des braqueurs... Tant mieux, c’est d’ailleurs un peu d’actualité par les temps qui courent ! Tu as tourné avec cette nouvelle vague de réalisateurs français surdoués comme Besson et Kounen donc mais aussi Mathieu Kassovitz. Aujourd'hui ils mènent des carrières plutôt opposées... Besson est un homme d'affaire, Kassovitz est plutôt comédien... Tu regrettes cette période ou pas du tout ? Un peu oui, mais pas plus que ça car nos métiers sont des métiers d’aventures, donc il faut les laisser faire leurs chemins. Et ton expérience avec Michael Hanneke sur Code Inconnu ? J’ai adoré tourner avec ce Michael, un homme humain, généreux et qui sait ce qu’il ne veut pas ! Tu viens de Nice et de manière générale la Côte d'Azur c'est une terre de cinéma : Olivier Dahan, Abdellatif Kechiche, Jean-Pierre Mocky, Christophe Gans... Tous sont originaires du coin, sans parler des réalisateurs étrangers qui y ont tourné ou du festival de Cannes. Qu'est-ce qu'il y a de si spécial chez vous ? Nous bien sûr !(rires) Et justement, y retournes-tu souvent ? Le retour dans la grisaille parisienne, loin du soleil et des poissons frais c'est pas trop dur ? J’y retourne souvent. C’est une terre, un conte, un « angolo di paradisio » qui m’est cher... Dans A Tout Prix de Yann Danh (voir dossier) tu interprètes Thierry Cortal, un sénateur cynique très typé MEDEF qui veut punir les employés séquestrant leur patron. Il n'hésite pas à employer le terme « terroristes ». On est en plein dans l'actu malheureusement. C'est quelque chose qui t'inspire dans ton métier le fil de l'actualité ? Enormément et c’est pour cette raison que j’ai souhaité jouer Cortal. Tu as aussi joué dans un autre court qui s'appelle L'atente. De quoi s'agit-il ? Un tout autre calibre le film de StrAtos Gabrielidis (lire l'interview à ce sujet), monteur à la Cité du Cinéma. C'est un film que tous les couples devraient voir car la réalité est souvent plus terrible que la fiction en ce qui concerne les pères de familles françaises. Tu as également travaillé avec un type que j'admire c'est Tom Fontana pour sa série Les Borgia, dans laquelle tu interprètes Guillaume Briçonnet, le Cardinal de St Malo. Fontana a aussi créé la série "Oz" (lire le dossier spécial Tom Fontana). Comment l'as-tu rencontré et décris-nous ta façon de travailler avec lui et sur la série de manière générale. « Tom is a magicien d’Oz »(rires). Un homme entièrement dévoué à son écriture et aux acteurs qu'il aime profondément, un homme qui donne sa chance aux auteurs, acteurs, réalisateurs, producteurs et qui fait corps avec son travail. De plus c'est un génie de l’humour à la ville comme à l’image. Tu as interprété Napoléon Ier lors de la Campagne de Russie, ce qui te rapproche de tes origines méditerranéennes (Napoléon est né à Ajaccio). C'est double pression pour toi un rôle pareil j'imagine? Il y a un avant et un après « Napo » à mes yeux… C’est comme Cyrano ou Trigorine ou le Dracula. Ce sont des rôles qui te jouent plus que tu ne les jouent. Alors justement les productions télé ! On a parlé de Tom Fontana mais il n'est pas le seul. Aujourd'hui les séries cartonnent notamment grâce à la chaîne Netflix. Certaines ont d'ailleurs des budgets dignes du cinéma. Comment tu expliques ce succès ? Le vide français. J'ai remarqué que tu es ouvert à l'international. Tu parles anglais et italien, tu es à l'aise en France comme à l'étranger alors finalement quelles sont les différences entre jouer pour une production internationale d'un côté et française de l'autre ? Les productions internationales ont une approche différente, le salaire (rires) et surtout il y a beaucoup plus de respect entre les corps de métiers, on se sent vraiment en chapelle et complètement en incubation, car le travail sur le personnage veut vraiment dire quelque chose pour eux, le travail ! En France, à mes yeux, les acteurs sont d’abord choisis parce qu’ils sont « vus » et pour leur facilité à séduire les présentateurs télé. Ce qui m'amène à parler des films d'action ! Un ami réalisateur me confiait qu'un film d'action français part avec un malus de base car les américains le font mieux que nous. Pareil pour les films d'horreur. Tu partages cet avis ? C’est une question de moyens et de travail et de production, donc de risques à prendre… le reste c’est de la bourrée auvergnate ! Alors on voit que tu peux jouer des flics ripoux, des voyous, des personnages historiques peu recommandables, des politiciens sans scrupules mais tu joues aussi dans des productions plus « légères » comme la série Un week-end chez les toqués ou L'homme de la situation avec Stéphane Plaza ! Tu ne pas peur de te perdre parfois ? Et comment fais-tu pour digérer tous ces rôles tellement différents ? Je ne me suis pas encore perdu, ca viendra peut-être, mais ça fait parti de mon job, le point commun de tous ces genres est la facilité que l’on peut avoir à « s’amuser » dans ces rôles quels qu’ils soient, garder le côté « enfant intérieur » que nous avons tous. Et le théâtre ? Je crois que tu viens d'interpréter Dracula ? Mais je t'ai aussi aperçu dans le film Arrête de pleurer Pénélope de Juliette Arnaud. Arrête de pleurer et Dracula c'est complètement schizophrène comme choix ! Comment tu concilies les deux ? Pour Dracula, ma fille de sept ans, Thia, à qui j’expliquais que j’allais jouer Cyrano, car j’alternais entre ces deux rôles, me dit un jour : « ça s’est bien passé papa ton Dracula de Bergerac ? » J’ai d’ailleurs remarqué qu’un beau rôle enrichi le suivant. Comment abordes-tu un rôle cinéma, un rôle télé ou théâtre ? Ce n'est pas le même public donc pas la même préparation j'imagine ? Au théâtre on répète pour aller de l’avant « live on stage » Au cinéma, on construit un puzzle jour après jour, puis on le voit, ce qui n’est pas le cas du théâtre par ailleurs. Et puis pour la télé, on est dans le « present time » et on s’adapte le plus vite que l’on peut. Un bon exercice parfois. Tu es donc un véritable caméléon : télé, cinéma, théâtre, séries TV, courts-métrages... ça te vient d'où cette boulimie ? Je dirai que c’est une passion, la boulimie c’est une pathologie ! Bon et les affiches ! Un film, une pièce de théâtre, un court-métrage, tous ont besoin d'affiche pour conquérir le public. Qu'est-ce que tu aimes voir sur une affiche, d'un point de vue personnel ? Un angle de tir. Affiches Dobermann © Patrick Tanguy pour Nuit de Chine En tant que comédien, est-ce-que tu as un droit de regard sur la conception des affiches ? Et selon toi quel effet ça fait pour un comédien de s'admirer sur une affiche ? C'est secondaire à mes yeux… quant a donner son avis, « M. Kasso » nous avait demandé notre avis pour l’affiche de La Haine et nous avions tous été d’accord pour l’affiche qu’il a retenue a l’époque. As-tu déjà vu un film grâce à son affiche, comme ça sans le connaître ? Non, mais j’adore le principe de l’affiche, je trouve que c’est un art, et d’autant plus aujourd’hui ou l’impact est de mise. Ton affiche de film préférée ? Le Grand Bleu, Nikita, La Haine, Dobermann, et les affiches de dessins animés aussi ! Ton acteur-totem ? Ce sont les rôles qui sont « totem » tu sais. Brando, Streep, Washington, Freeman, Crowe, Reno, Begnini, La Magnani, il y en a tellement ! L'actrice avec qui tu rêves d'être coincé dans l'ascenseur ? Meryl Streep. Tu t'échoues sur une île déserte mais heureusement tu peux emporter un film avec toi. Un seul. Lequel ? Gladiator. Vivant ou décédé, avec quel réalisateur aimerais-tu ou aurais-tu aimé tourner ? Visconti. Ton meilleur souvenir de tournage et au contraire le pire ? Nikita pour le meilleur. Quant au pire, il est toujours à venir non ? (rires) Voilà enfin c'est fini ! Marc merci infiniment pour ton temps et ta gentillesse. De rien.