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Double exposition


Mode écrêtage et layer mask

Dans notre nouvelle étude de cas plusieurs affiches récentes ont tapé dans la lunette de notre microscope culinaire. Le coupable ? Le mode « écrêtage » ou « layer mask » en anglais ou encore la « double exposition », bien connu des grapheux qui l'utilisent de plus en plus. Il consiste à remplir une forme précise de différents éléments, pêle-mêle. A titre de comparaison, c'est comme fourrer son bazar dans le vide-poche du couloir ou dans le tiroir du buffet. On contient le bordel en quelque sorte, on canalise le merdier, ou comme disait Condoleezza Rice à propos de l'Irak : « It's creative chaos ! »


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Le Transporteur Heritage

Le Transporteur Heritage

Réalisation : Camille Delamarre, 2015

Le dernier joujou de Luc Besson recharge son arme fatale : un scénariste aux abonnés absents, sans doute perdu autour de la machine à café de la Cité des Lumières. Enfin, on passe quand même un bon petit moment avec une grosse berline allemande qui fout la honte à nos bonnes vieilles Renault sur les routes ensoleillées du sud de la France. C'est pas si mal en ce moment. L'affiche est flamboyante comme un coucher de soleil sur la Côte d'Azur et dynamique comme une course-poursuite Audi-Peugeot. On incruste ses textures, on floute, on décale, on colle des halos, on justifie le texte par rapport à la silhouette et on termine par le raccourci clavier cmd + alt + G. Superbe.

Vice Versa

Vice Versa

Réalisation : Pete Docter & Ronnie Del Carmen, 2015

On commence par le dernier Disney-Pixar qui nous invite dans la tête d'une fillette fraîchement débarquée à San Francisco depuis son Midwest natal. Forcément ça déstabilise. Donc l'affiche française nous incruste avec le raccourci clavier cmd-alt-G sur mac, ou shift-alt-G sur PC, les émotions personnifiées dans la cervelle de la petite Joy. C'est beau et coloré comme un parc d'attraction et techniquement il faut pouvoir réaliser la bonne créa pour la bonne silhouette. Pas si simple. Le mieux est de fusionner tous vos calques contenant votre ambiance sur un seul calque puis de passer ce dernier en écrêtage dans le profil. Ne pas oublier de passer la goutte d'eau pour atténuer les contours avec un très léger flou. Nous le verrons plus loin, le fond blanc et l'écrêtage ce sont LES solutions idéales pour simplifier une situation compliquée.

Tomorrowland

Tomorrowland

Réalisation : Brad Bird, 2015

Disney nous ressert de la viande. Avec son scénario digne des meilleures recettes scientologues, le « pays de demain » glisse un bien bel écrêtage sur le beau George. On apprécie quand même la gestion subtile des effets lumineux et la (légère) sous-exposition au niveau du visage. Peut-être même un simple coup de pinceau blanc en opacité réduite. Ici plus que jamais les contours sont floutés à la goutte d'eau et les halos lumineux traités en lumière tamisée. Beaux calques de réglages et bonne gestion des modes de fusion afin d'augmenter les couleurs du néo-Dubaï en fond. Touche finale à rendre jaloux une équipe de designer allemands : le Burj Khalifa se reflète dans les lunettes de Mr Nespresso. Donc double effet "what else?" avec le rendu intérieur/extérieur propre à l'écrêtage superbement retranscrit ici. La ville est dedans mais dehors aussi. Pas con.

Le Transporteur Heritage

Chappie "Chappo"

Réalisation : Neill Blomkamp, 2015

C'est le problème des techniques trop souvent employées dans les labos des boîtes de com'. Enfin bon, belle affiche quand même avec son éternel fond blanc quasi incontournable dans ce genre de montage. Chappie le gentil robot contient les 2/3 de la composition globale. Souvenez-vous la fameuse règle aperçue dans l'analyse de Dark Places du schizophrène Gilles Paquet-Brenner : les 2/3 – 1/3 sont obligatoires dans TOUTES les créations visuelles. La symétrie est à bannir à moins d'avoir un vrai message à délivrer. Sinon belle exposition générale, le regard se balade entre extérieur/intérieur de manière naturel. Good job.

Inherent Vice

Inherent Vice

Réalisation : Paul Thomas Anderson, 2014

Les affiches du dernier opus de Paul sont saluées par le milieu comme étant de vraies œuvres d'arts à exposer d'urgence au Louvre. Au lieu de ça on enterre les vagins en métal d'Anish Kapoor dans les jardins de Versailles. L'artiste a dû filer un bon de réduction à Fleur Pellerin, c'est pas possible autrement. Ici l'écrêtage part volontairement en sucette et joue la carte d'or de l'originalité. La grosse silhouette de Josh Brolin a du mal à contenir le contenant ce qui a pour effet de perturber la relation extérieur/intérieur Il y a aussi le côté artisanal, peut-être aérographe, et puis ces sublimes diagonales avec le néon vintage, les couleurs qui débordent, le trait BD. Quelqu'un connaît le nom du Maître ?

Need for Speed

Need for Speed

Réalisation : Scott Vaugh, 2014

La diagonale du fou. Plus que le film avec Michel Piccoli c'est surtout une règle immuable du graphisme : la diagonale dynamite votre composition. Dans le bon sens bien sûr. C'est simple il n'y a pas mieux pour booster le contenu, filer le tournis au public et représenter le mouvement. On a presque envie d'imiter un moteur hurlant à la bouche. Si par-dessus vous saupoudrez de filtre directionnel alors même une pure harissa ressemblera à de la mayonnaise, à titre de comparaison. Ceci dit le graphiste doit être le même que sur Chappie, on l'a déjà dit et analysé plusieurs fois. Sauf que là tout est à droite... et pas à gauche. Suffisait d'y penser. Alors beaux calques de réglages, belle compo, beaux effets pyrotechniques, belles textures, beau flou directionnel. En gros tout est beau... même le film d'une certaine manière. Bah oui pour une adaptation de jeu vidéo ce n'est pas la bouse attendue sur la ligne de départ. Disons un bon quatrième.

Blue Ruin

Blue Ruin

Réalisation : Jeremy Saulnier, 2013

La ruine bleue est un film intéressant à plusieurs égards. Malgré son nom le réalisateur ne vient pas de Besançon mais de Brooklyn, ce qui n'a donc rien à voir. Il finance son bébé grâce à 37000$ recueillis sur KickStarter une plateforme de crowdfunding. Il tourne avec des potes et réalise un rêve qu'il traîne depuis l'âge de 8ans. Il se présente même à la Quinzaine des Réalisateurs grâce à une superbe affiche qui joue avec malice sa technique écrêtage. On retrouve aussi la gestion au plus-que-parfait du 2/3 – 1/3 si chère à Gilles le schizo mais surtout ce néo-écrêtage typographique avec placage de texture et coucher de soleil + ombres dramatiques. Pour obtenir cet effet de cassure, avec le lasso polygonal sélectionnez les parties à déplacer, puis avec les flèches droite/gauche du clavier bougez de quelques pixels. Peignez de légères ombres pour donner du relief.

Forces Spéciales

Forces Spéciales

Réalisation : Stéphane Rybojad, 2011

Gros écrêtage façon cas d'école. En France on adore ça et on en colle dès qu'on a l'occasion. Le gros plan Diane Kruger et la police Impact se détachent du peloton. Cette affiche ne demande qu'à exploser mais problème : le film de décolle jamais. Stéphane le souriant a lorgné sur la copie de tonton Ridley et son Black Hawk Down. A votre avis que se passe-t-il ? Eh bien Stéphane nous ennuie avec ses clichés Afghans tandis que Ridley nous divertit en Somalie. Au final c'est toujours l'Angleterre qui s'impose. On retrouve aussi la gestion au plus-que-parfait du 2/3 – 1/3 si chère à Gilles le schizo mais surtout ce néo-écrêtage typographique avec placage de texture et coucher de soleil + ombres dramatiques. Pour obtenir cet effet de cassure, avec le lasso polygonal sélectionnez les parties à déplacer, puis avec les flèches droite/gauche du clavier bougez de quelques pixels. Peignez de légères ombres pour donner du relief.

Invictus

Invictus

Réalisation : Clint Eastwood, 2009

C'est un bon film parce que c'est le grand Clint qui regarde dans le moniteur. D'ailleurs le monsieur est au-dessus des critiques et ses films s'en ressentent : il fait ce qu'il veut. Il engage ses potes, met du pognon pour produire et compose lui-même sa musique. Bon là c'est son fils. Au menu : deux grosses contre-plongées façon héros Marvel à la sauce Springbok. Les typos jouent leur rôle à fond et complètent le vide car la nature en a horreur. Gros logo de la coupe du monde et gros nez cassé de rugbyman pour deux gros regards aux destins croisés. Super travail sur les lumières qui viennent éclairer nos héros tels le Messi face au Créateur. Ecrêtage classique avec son raccourci cmd+alt+G c'est simple donc c'est beau. On trouve aussi notre indispensable fond blanc, des contours flouttés, une belle lumière tamisée, bref le graphiste nous caresse le regard dans le sens du poil et gère ses clairs/obscurs de manière subtile.