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Cartel Land

par Jean-Luc Herbulot pour les belles affiches (relire l'interview)


Réalisation : Mathew Heineman, 2015

Cartel Land
La critique

Attention, gros docu de fou flingué ici. Je ne suis pas forcément un grand consommateur du format, faute de temps, d'inspiration ou de recommandations, mais je me corrige avec le temps. Le docu est malheureusement grangréné par ce qu'on appelle le "docu-fiction", souvent mal branlé, mal raconté, mal réalisé faute de vrais moyens. Heureusement "Tierra de Carteles" a le meilleur des mondes. Vrai documentaire mis en scène comme un faux film, une photo, un montage et une narration que j'ai rarement vu dans un docu. Le réalisateur Matthew Heineman fait monter la pression avec le luxe d'arriver à inclure des effets/outils qu'on ne connaissait que dans les fictions : la tension et le suspense. Cartel Land parcourt à vol de drone la frontière américano-mexicaine en suivant le point de vue deux couillus du peuple. Deux citoyens au départ sans histoire qui ont décidé de s'improviser « chefs de guerre » face aux cartels. Des supers héros du ghetto qui ont pris Kalash' et M4 pour trouer l'anus des Narcos. Chacun à sa manière, chacun avec sa philosophie, ses couilles de taureau autour du cou, les deux hommes nous embraquent dans leur monde de souffrance, de violence quotidienne, qu'elle soit psychologique côté hamburger ou complètement gore côté tacos, Cartel Land fout la frousse. Ayant vécu la guerre civile moi-même je dois dire que j'ai revécu pas mal de moments et de détails que seul ce genre d'évènements procure au corps et à l'esprit. Je félicite ainsi Heineman pour son courage et son jusqu'au boutisme autant pendant l'épreuve du feu qu'aux gens qu'il décide de suivre. La guerre des cartels fout la pétoche aux américains depuis plus de dix ans et plus le temps passe plus la guerre se rapproche en dépassant la frontière. Sicario tentait déjà d'évoquer le sujet avec classe et retenue mais tout en pression. Le documentaire de Heineman va loin dans l'infiltration, n'hésitant pas à accompagner le vétéran « docteur » chef de guerre mexicain dans leurs descentes populaires anti-narco. Il réussit à capter l'atrocité de la violence, de la trahison, de la corruption, du mal bicéphale, avec une conclusion qui nous laisse pessimiste sur un phénomène qui gangrène l'Amérique et qui semble être le cancer direct de l'hyper capitalisme vendu par les Etat-Unis. D'un point de vue purement technique, Cartel Land sidère par sa beauté formelle, son montage tout en douceur mais en complexité. On se demande sans cesse si ce qu'on voit est bien réel ou mis en scène, si les mecs qu'on filme savent qu'on les filme, si Heineman ne va pas retrouver sa tête au bout d'un pieu dans le désert. Pour ceux qui ont aimé Sicario, Cartel Land est un complément plus qu'utile pour comprendre le bordel dans lequel baigne ce pays et à quel point les yankees sont dans une merde noire avec laquelle il est compliquée de jongler. Cartel Land a fait un carton au Sundance 2015 en remportant le prix du meilleur docu et de la meilleure photographie. On doit notamment à Heineman les documentaires Escape Fire sur le système de sécurité sociale américain ainsi que le documentaire Our Time d'après le synopsis : growing up, 9/11, race, the Internet, careers, sex, love, and the American Dream. Un monsieur avec des « cojones » grosses comme ça et qu'on va s'empresser de suivre rapidement.


L'affiche

On sent l'inspiration de Trafic (Steven Soderbergh, 2000) sur cette affiche sans forcément comprendre pourquoi on ne trouve qu'un seul type quand le docu en suit deux. Zarbi. Anyway, affiche simple et efficace qui pour ma part me rappelle la belle époque du Powder Keg de Iñárritu, film pub pour BMW qu'il faut découvrir au plus vite. Bisous les grizzous !